« Comme la plupart de mes camarades, j’ai porté des bagues au collège, raconte Murielle. Ça a duré plus de trois ans et j’en garde un très mauvais souvenir. C’était non seulement moche (j’avais déjà une tonne de complexes à cet âge-là, je me serais bien épargnée la bouche d’acier) et pas du tout pratique pour manger - impossible de croquer dans une pomme ou de mâcher du chewing-gum. C'était aussi douloureux, notamment quand mon dentiste resserrait l’arc ou le changeait. » Cette cadre commerciale de la région lyonnaise se souvient encore qu’elle avait tellement mal aux dents qu’elle n’arrivait souvent plus à mastiquer pendant plusieurs jours. « Une vraie galère, confirme-t-elle. Il m’arrivait d’en pleurer, la nuit, dans mon lit. » Cerise sur le gâteau : le fil métallique irritait constamment sa langue, l’intérieur de ses joues et ses gencives, lui occasionnant des aphtes dans la bouche, et ce malgré l’application des boulettes de cire orthodontique.

Un traitement douloureux

« Je n’en pouvais plus, lâche la quinquagénaire. Mais mes parents me disaient que c’était le prix à payer pour avoir de jolies dents en bonne santé, plus tard. » L’adolescente fait alors contre mauvaise fortune, bon cœur, même si elle ne comprend pas très bien l’enjeu de ce traitement ingrat de la puberté. « Autant dire que le jour où l’on m’a retiré cet instrument de torture, j’ai sauté de joie, explique-t-elle. J’étais très contente du résultat. Mes dents étaient parfaitement alignées. Elles me paraissaient immenses, fines et légères. » La quinquagénaire avoue ne plus se souvenir de cequ’il s’est passé après la dépose de son appareil. « Je ne pense pas que mon dentiste nous ait parlé de contention à un moment donné, glisse-t-elle. À l’époque (c’était quand même il y a plus de quarante ans), ça ne se faisait d’ailleurs peut-être pas. En tout cas, je n’ai eu ni fil à l’arrière de mes dents, ni gouttière à porter la nuit. Ou alors, j’ai fait l’autruche et laissé croupir cette dernière dans sa boîte. »

« Je me disais que j'avais fait tout ça pour me retrouver, dix ans plus tard, au point de départ »

Sauf que… sans contention, les dents de Murielle n’ont pas tardé à rebouger. D’autant que la jeune femme ne s’est pas fait enlever les dents de sagesse, comme le lui recommandait son dentiste. En poussant, ses troisièmes molaires ont exercé une pression sur les autres dents et les ont déplacées, créant des chevauchements en haut, comme en bas. « J’étais dégoûtée, dit-elle. Je me disais que j’avais fait tout ça pour me retrouver, dix ans plus tard, au point de départ. Ou presque. » Persuadée qu’elle a passé l’âge des appareillages, Murielle est, des années durant, complexée par sa dentition, au point de ne plus sourire sur les photos, ou alors en faisant le maximum pour cacher ses dents, mais elle fait avec.

C’est l’orthodontiste de sa nièce qui lui laisse entendre que tout n’est pas fichu. « J’avais accompagné Juliette pour le retrait de ses bagues et, alors, que je m’extasiais devant ses quenottes toutes droites, il m’a expliqué que les traitements n’étaient plus exclusivement réservés aux enfants et aux adolescents, détaille Murielle. Des techniques plus discrètes (et moins barbares) permettaient, disait-il, à de nombreux adultes de sauter le pas. Il a ajouté que l’orthodontie n’était pas qu’une question d’ordre esthétique, elle avait aussi un impact non négligeable sur la santé bucco-dentaire. »

Retrouver la motivation

Un mois et quelques clics plus tard, histoire de se renseigner sur les différentes techniques et de lire quelques témoignages, la quinquagénaire est de nouveau, dans le cabinet du spécialiste. Mais, cette fois, pour elle. Ce jour-là, elle a droit à un bilan complet : prise d’empreintes, photographies de l’intérieur de la bouche et du visage, radiographie panoramique... Lors du deuxième rendez-vous, l’orthodontiste lui présente les différentes possibilités de traitement. « Quand il m’a dit que j’avais un gros encombrement dentaire et qu’il n’y avait pas d’autre choix que d’enlever non seulement les quatre dents de sagesse, mais aussi les quatre prémolaires, j’ai pris une sacrée douche froide, reconnaît Muriel. Mais j’étais motivée et je n’ai pas baissé les bras. »

« Quel bonheur d'avoir retrouvé un sourire assumé »

Après discussion avec son orthodontiste, Murielle choisit de porter un appareil visible, avec des bagues en céramique blanche posées sur les faces externes de ses dents. Les autres traitements - le lingual, qui consiste à coller les attaches sur la face interne de l’arcade, et l’invisalign (une technique qui permet d’aligner les dents grâce à des gouttières transparentes de plus en plus serrées) - étaient au-dessus de son budget. Et comme la sécurité sociale et sa mutuelle ne prenaient rien en charge, le choix était vite fait pour elle. « Je n’ai pas eu l’énergie de demander d’autres devis ailleurs, explique-t-elle. Je savais que ça allait durer près de deux ans et j’avais envie de commencer le plus vite possible. »

Cela fait maintenant dix-huit mois que Muriel ne porte plus d’appareil (hormis le fil de contention et les gouttières qu’elle porte la nuit avec la plus grande assiduité) et elle adore le résultat. « J’ai, bien sûr, traversé quelques moments de découragement, concède-t-elle. Les déjeuners à l’extérieur étaient souvent pénibles. J’étais obligée de réfléchir en amont à ce que j’allais manger pour ne pas finir avec de la nourriture coincée entre les dents. Il n’empêche : j’ai, globalement, plutôt bien assumé mes bagues. Je savais pourquoi je les portais et je les ai même souvent oubliées. Et quel bonheur d’avoir retrouvé un sourire assumé ! »