Face à un rayon de parfumerie, le dilemme s’impose : que choisir entre une eau de parfum et une eau de toilette ? Qu’est-ce qui distingue ces deux jus ? Quid des appellations « parfum » et « eau de cologne » qui se mêlent, elles aussi, à la bataille ? Une chose est sûre, on s’est déjà tous et toutes posé ces questions. Pour y répondre, on s’est tourné vers Patty Canac, spécialiste en aromachologie chez 100BON. Et cela résulte de nombreux facteurs finalement.
Une simple histoire de concentration…
Sans surprise, ces appellations relèvent d’un degré de concentration, autrement dit de dilution de parfum dans l’alcool. « En règle générale – puisqu’il n’existe aucune réglementation – , les parfums détiennent une concentration supérieure à 20%, les eaux de parfums avoisinent les 15% quand les eaux de toilette tournent autour de 10%. En ce qui concerne les eaux de cologne, pas plus de 5% », explique Patty Canac.
Le parfum – aussi appelé essence ou extrait – étant plus concentré, donc plus rare et précieux, représente « le summum de la parfumerie », selon l’experte. Un jus, presqu’un objet, de caractère très personnel, d’où son coût plus élevé, que l’on porte avec parcimonie. Il fut même un temps où l’on disait qu’il « se déposait par touches au niveau de poignets, derrière les oreilles et aux points de pulsation ».
L’eau de parfum – plus répandue de nos jours – possède une concentration olfactive un peu en deçà du parfum. Pour autant, il assure une bonne tenue sur la peau, les cheveux ou les vêtements sans trop perdre en caractère.
L’eau de toilette, plus subtile et plus légère, tend à apporter de la fraîcheur à celui ou celle qui le porte. Idéale pour l’été grâce à sa faible concentration, celle qui servait à masquer les odeurs à sa création, a fait un bout de chemin devenant un jus à part entière. Éphémère, elle nécessite de se reparfumer plusieurs fois dans la journée. En revanche, elle est fortement appréciée des personnes qui aiment changer régulièrement de fragrance.
L’eau de cologne est donc le jus le moins corsé. Elle est connue pour son côté ultra-rafraîchissante que l’on s’applique sur le corps à la sortie de la douche. Sa tenue est moindre.
… mais pas que !
Mais l’experte nous indique que ces normes induites (et jamais fixées) ont évolués au fil du temps. Aujourd’hui, « en tant que parfumeur, nous répondons à un cahier des charges lorsque l’on créé un parfum, commence-t-elle par expliquer. Et les marques ont tendance à souhaiter des parfums qui tiennent de plus en plus, c’est-à-dire un sillage plus important qu’avant. C’est tout naturellement que les pourcentages ont évolué, donc. C’est, aujourd’hui, une liberté qui varie selon le brief et l’accord entre la société de parfumeur et la marque ».
Mais cela va plus loin. Le monde de la parfumerie n’étant plus celui qu’il était avant, selon l’experte, d’autres facteurs rentrent en compte : à l’instar du pays de commercialisation qui joue également beaucoup sur la création du jus. En effet, un parfum vendu sur le marché européen ne sera pas le même qu’un parfum pensé pour le Moyen-Orient. Ainsi, « une fragrance destinée à une clientèle située à Abu Dhabi peut monter jusqu’à 18% en termes de concentration et se faire appeler eau de toilette, pour d’autres questions ».
Un autre critère peut déterminer si le jus sera de l’ordre du parfum ou d’une eau : le budget. Celui-ci influence le choix de la matière première ainsi que sa concentration. L’expert image ses propos : « si je fais un cocktail pour 8 personnes, ce ne sera pas la même réception que pour 80, notamment avec le même budget. Eh bien, il en est de même pour le jus. Pour créer une eau de parfum, on prend des matériaux différents et pourtant très proches qui seront de la même interprétation que ceux contenus dans le parfum. C’est une simple déclinaison. Et vice versa. Si une eau de toilette contient de la rose, je mettrais de l’absolu de rose (plus concentré) dans le parfum. En fonction du budget, je mets d’un côté des diamants et de l’autre des strass ».
Sans oublier les habitudes de consommation de chacun. La société a évolué et les modes de consommation avec. S’il y a quelques années, il était fréquent qu’une personne soit fidèle à son parfum tout au long de sa vie, aujourd’hui, il n’est pas rare de rencontrer des personnes qui détiennent plusieurs flacons. « Aujourd’hui, et ce grâce à la mode notamment, on achète davantage de parfums pour le plaisir, indique l’experte. On en change en fonction des occasions et du choix de nos tenues. Il est loin le temps où nous n’avions qu’un pull dans notre garde-robe, et bien en parfumerie, c’est pareil ». C’est en tout cas une des nouvelles volontés des parfumeurs : répondre aux attentes de consommateurs qui ont un engouement pour le changement. « C’est la culture du zapping que l’on connaît notamment avec Tiktok, Netflix… Elle s’étend à la parfumerie, poursuit Patty Canac. D’où cette multitude de propositions aux multiples appellations dans nos rayons de parfumerie ». La boucle est bouclée.