La dernière victoire de la France à l'Eurovision remonte à 1977. À Londres, au Wembley Conference Centre Marie Myriam remportait le concours avec 136 points grâce à son titre « L’oiseau et l’enfant ». Quarante-huit ans plus tard, Louane pourrait bien marcher sur ses traces. Car, entre une chanson bouleversante, une équipe artistique redoutablement efficace et un storytelling parfaitement orchestré, tous les voyants semblent au vert. De notre côté, on y croit vraiment.
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Une chanson personnelle mais universelle
« Toi, tu vas comment ? / Est-ce que tu vois tout ici ? / Et j'ai bien changé, j'ai bien grandi ». Dans « maman », Louane joue la carte de l’émotion à l’état brut. Écrite comme un hommage à sa mère décédée d’un cancer, la chanson est également une déclaration d’amour à sa propre fille, dont la voix se fait entendre. Cette double lecture – la perte et la transmission – crée une résonnance puissante et intergénérationnelle. Et c’est là toute sa force : profondément intime, le titre touche à l’universel. En français, comme en anglais, « maman » parle à tout le monde, quel que soit l’âge, l’histoire, le pays. La recette d’un tube, mais aussi d’un titre gagnant pour cette compétition. On se souvient notamment d’« Amar pelos dois » de Salvador Sobral, en hommage à son grand-père, qui a remporté l’Eurovision pour le Portugal en 2017.
Une stratégie de communication bien pensée
Depuis l’officialisation de sa participation, Louane a su maîtriser l’art du teasing avec une montée en puissance parfaitement orchestrée. D’abord, le contexte spectaculaire de la révélation de la chanson : en direct du Stade de France, à la mi-temps du match France-Écosse, devant près de neuf millions de téléspectateurs. Une prestation largement relayée sur les réseaux – y compris à l’étranger – où la candidature française est jugée solide et sérieuse. Et c’est ce qui compte, puisque ce sont les autres pays qui votent.
À quelques jours du grand verdict, elle a publié une version anglaise du titre (accompagnée d’un clip). Une façon de toucher un public plus large à l’échelle européenne et diffuser son message au maximum. Enfin, elle a rendu un hommage subtil et symbolique à Céline Dion – dernière francophone à avoir remporté l’Eurovision – en reprenant « Ne partez pas sans moi » sur son compte Instagram. Une stratégie millimétrée, qui conjugue émotion, efficacité et mémoire collective.
Une chanteuse (très) bien entourée
Pour porter « maman » sur scène, Louane s’est entourée de ce qui se fait de mieux. À la direction artistique : Frederik Rydman, alias « Benke », un maître de la mise en scène eurovisionnesque. Pourquoi c’est un excellent choix ? Il est derrière les victoires de Nemo en 2024 (« The Code ») et de Måns Zelmerlöw en 2015 (« Heroes »).
Il a conçu pour la chanteuse une scénographie sobre mais puissante : selon les vidéos diffusées sur les réseaux, la chanteuse apparaît au centre d’une tornade de sable, un décor symbolique qui évoque le tumulte émotionnel du deuil et de la maternité. C’est poétique, maîtrisé techniquement (malgré quelques couacs en répétition aujourd’hui corrigés), et surtout au service de l’émotion.
Grande fan du concours – un rendez-vous qu’elle ne manquait sous aucun prétexte avec sa mère – Louane sait parfaitement ce qu’on attend d’une performance gagnante : un message clair, une esthétique forte, et une authenticité palpable.
Un engouement massif sur les réseaux sociaux
Depuis ses premières répétitions à Bâle, Louane est partout. Tik Tok, Instagram, X : les images de ses performances, notamment sa scénographie en forme de tornade de sable, se partagent à grande vitesse. « Je sais reconnaître la prestation d’une gagnante », écrit un Anglais sous sa vidéo postée par le compte Instagram de l’évènement. « En 2026, l’Eurovision se fera en France », ajoute un Espagnol. L’émotion qu’elle dégage, sa sincérité et sa sobriété tranchent avec les performances parfois trop calibrées du concours. Résultat : les eurofans sont conquis, les commentaires pleuvent, et l’algorithme l’adore.
Des cotes favorables chez les bookmakers
Depuis plusieurs semaines, Louane figure dans le trio de tête des parieurs. À quelques jours de la finale, elle est créditée de près de 10 % de chances de victoire selon les plateformes spécialisées, juste derrière la Suède et l’Autriche. Ces statistiques, même si elles ne prédisent pas tout, sont généralement de bons indicateurs : elles reflètent à la fois l’avis des jurys potentiels, l’opinion des eurofans et l’écho médiatique. À titre d’exemple, Barbara Pravi était montée sur le podium avec un classement similaire.
Autre élément à prendre en compte : de nombreux eurofans estiment que le niveau global de cette édition 2025 est plutôt faible, sans favori clair. Une fenêtre de tir idéale pour la France, qui dispose d’un titre fort, d’une mise en scène impactante et d’une candidate aimée du public.
Mais rappelons-le, comme toujours à l’Eurovision : tout se joue en direct. Aussi millimétrée soit la préparation, c’est le moment du live qui décide de tout. Mais Louane n’est pas du genre à trembler : elle n’a peut-être pas gagné The Voice, mais elle a décroché un César, une Victoire de la musique. La compétition, elle connaît. Et elle sait en sortir gagnante. Et si, après Marie Myriam, c’était enfin Louane que l’Europe s’apprêtait à couronner ?