À ELLE, il y a les journalistes « mode » et il y a les autres. Celles qui n’ont pas la chance d’aller aux défilés mais qui suivent les plumes maison sur Instagram, pour dénicher les bonnes idées à piocher, les tendances du moment, les « people » invités au premier rang (et n’en reconnaissent pas la moitié). L’autrice de ces lignes fait clairement partie de cette deuxième catégorie – sa garde-robe en atteste ! Mais voilà que, un jour, l’émotion s’invite sans que l’on s’y attende, née d’un défilé pas tout à fait comme les autres, découvert sur les réseaux sociaux. 

Une larme de bonheur

Fin janvier, en pleines collections haute couture printemps-été 2025, ce frisson avait pour nom Valentino. C’est délicat d’expliquer pourquoi, comment, à un moment précis, tout est réuni pour vous ravir : la musique de Prokofiev (« Roméo et Juliette »), ces femmes « belles sans ornements » qui s’élancent sur le podium, dans le noir, comme on avance dans la vie, et puis… cette robe. Immense, montée sur crinoline, en crêpe de Chine, à motifs Arlequin, tout droit sortie d’un songe. Un patchwork, un tour de magie, une ode à la commedia dell’arte, qui a nécessité 1 300 heures de travail, a-t-on appris plus tard. Tant de sueur pour un sanglot retenu, une larme de bonheur. 

Le reste du défilé orchestré par le designer Alessandro Michele, arrivé chez Valentino l’an dernier, était à l’avenant. Inspiré, enchanteur, savant. Le fruit du travail et de la grâce. La haute couture se niche là, peut-être, dans cet instant. Une émotion qui vous submerge. Un accomplissement. Qui a oublié les défilés légendaires de John Galliano à ses débuts chez Dior, trésors de débauche baroque ? Ceux d’ Alexander McQueen – et son show baptisé « Deliverance », inspiré du film « On achève bien les chevaux » ? Ceux de Martin Margiela… Et bien d’autres encore. La couture, c’est une petite musique qui, d’un coup, touche une corde sensible, ne parle rien qu’à nous : du sur-mesure. Volatil, mais pas futile.

L’édition de la semaine :

couv

ELLE n°4129. © JUANKR