On connaissait la main de fer dans un gant de velours, Jane Fonda a inventé le bras d’honneur dans un habit de lumière. Alors qu’elle recevait, le 23 février, une récompense pour l’ensemble de son œuvre à la cérémonie des Screen Actors Guild Awards, l’ actrice de 87 ans a prononcé un discours militant en réponse à la politique de Donald Trump. Pour une fois, même les serpents qui sifflent sur les têtes des comédiennes pour juger de leur physique comme s’il leur appartenait se sont tus devant tant de bravoure et d’humour.
L’empathie
Jane a commencé par noter que l’enthousiasme de la salle à son égard transformait ce moment du « crépuscule de sa vie » en un instant où elle se disait à elle-même « allez, ma fille, botte-toi les fesses!», avant d’ajouter que son chemin n’était pas fini. Puis, rappelant que lorsqu’on regardait un documentaire sur le combat pour la justice sociale, on se demandait tous ce qu’on aurait fait, elle a déclaré : « Nous n’avons plus à nous poser la question, car nous sommes dans notre propre documentaire.» Et pour se battre, elle a mis à l’honneur cette qualité nécessaire aux acteurs, et à l’humanité tout entière : l’empathie.
« Ne vous y trompez pas, l’empathie, ce n’est pas de la faiblesse, ce n’est pas woke. Au passage, woke signifie simplement que vous vous souciez des autres.» L’empathie. En un mot, la lumineuse Jane Fonda a renvoyé la politique de Trump à son obscurantisme et donné à toutes et tous – pas seulement aux Américains – l’envie de résister. À l’exclusion, au rejet de l’autre, à la barbarie. L’empathie, c’est ce sentiment étrange et familier qui permet de se mettre à la place de l’autre. L’empathie, c’est la substantifique moelle des acteurs, et aussi le fondement même de l’art, et de la littérature, en particulier. C’est souffrir hier avec Anna Karénine ou Emma Bovary, aujourd’hui avec Vanessa Springora ou Neige Sinno. En un discours historique, Jane Fonda nous a rappelé le prodigieux pouvoir de l’art dans les périodes de dominations. L’art est un trait d’union, une main tendue aux fragiles, un regard vers l’autre. Le 8mars, Journée internationale des droits des femmes, mettons l’empathie à l’honneur. Allez les filles, bottons-nous les fesses !