Printemps 2025, le mocassin fait sécession. Derrière ce retour en grâce, il y a une génération - la Gen Z en tête - qui n’a jamais connu l’uniforme scolaire mais s’en inspire à l’envi. Le mocassin devient alors un terrain de jeu codé : il se porte avec des chaussettes blanches hautes pour réveiller un fantasme à la Gossip Girl, version TikTok. Il flirte avec les vestiaires dark academia, clean girl, quiet luxury… et réussit l’exploit de les traverser tous sans jamais perdre de sa superbe.

Mais s’il revient, c’est aussi parce qu’il rassure. Il incarne une forme de permanence dans un monde où tout bouge trop vite. Le mocassin ne triche pas. C’est un soulier d’attitude. Et c’est peut-être pour cela qu’on le retrouve aux pieds de celles qui façonnent les récits mode d’aujourd’hui : Bella Hadid, Alexa Chung, mais aussi Emma Chamberlain, qui les porte à la croisée du vintage, de la provocation et de l’élégance.

Toutefois, le mocassin reste un marqueur social. Porté dans les couloirs de Wall Street comme dans ceux de la Sorbonne, il n’a jamais cessé de faire entendre sa voix. Il a habillé les Mods, les jeunes conservateurs, les féministes, les banquiers, les profs de philo. Il peut être de droite, de gauche, du centre… Il peut être protestataire, normcore, élitiste, ironique. Tout dépend de qui le porte - et comment.

Aujourd’hui, il a réussi être à la fois mainstream et ultra-niche. Il est partout. Il est vous. Il est nous.

Les mocassins à adopter ce printemps

Ce printemps, les mocassins racontent mille histoires. À commencer par celle du modèle Alanna de Bocage, qui prend le contre-pied du classique dans une teinte cognac, semelle à double trépointe à l’appui. Une silhouette affirmée, fabriquée en France, qui réinvente les codes du preppy. Plus loin en Italie, chez Gucci, le 1953 Horsebit revient comme une relique réactualisée : cuir ultra-brillant, presque liquide, pour une allure aristocratique et intemporelle.

Dans un registre plus rétro, Alohas revisité le mocassin à glands en blanc, comme tout droit sorti des bancs d’une université britannique des années 60. Même esprit chez Prada, qui prend de la hauteur avec une version légèrement surélevée, boucle ronde, cuir chocolat : le vestiaire masculin twisté.

Mais le printemps n’a pas dit son dernier mot : place aux tons laiteux et aux formes douces. Chez Paraboot, il se décline en crème, comme une évidence pour les beaux jours. Odissì, marque italienne montante, propose avec  Kali - un mocassin mule aux lignes pures, fluide, sans genre assigné. Même approche chez Socque, dont le modèle Lucca en cuir velours camel joue avec les volumes et les usages, grâce à sa bride arrière escamotable. La mule devient mocassin, le mocassin devient mule.

Et si certains modèles se font discrets, d’autres crient leur désir. La paire Delisa de Bally cultive l’épure suisse avec une précision quasi médicale, tandis que Nomasei prend le parti d’un mocassin bicolore mimosa et blanc, solaire, presque sucré. Enfin, il y a celles qui n’ont peur de rien : les mocassins en poils de poulain de Pompeii, indomptables, sauvages dans l’âme - à porter avec un jean blanc, ou rien du tout.