C’est au moment d’organiser une sortie à deux que Marc réalise que sa femme n’est jamais disponible pour lui : « Elle était tout le temps absente. Elle avait des trucs à faire avec sa mère, avec sa sœur, avec ses copines, avec son groupe de collègues. Elle rentrait tard le soir après des soirées passées sans moi, et avait très souvent des sorties prévues le week-end. C’est justement un week-end en amoureux que je voulais organiser. Et je ne pouvais pas. Elle n’était juste jamais là assez longtemps.

« Elle était désolée que je souffre »

J’ai fini par tout balancer pendant un dîner qu’on avait réussi à passer ensemble. Je lui ai dit que je souffrais de ne plus la voir, que je me sentais un peu abandonné, et surtout, que je ne voyais pas comment on allait pouvoir continuer à vivre comme ça sans finir par devenir des colocataires. Elle a été surprise mais elle a eu la bonne réaction. Elle m’a dit qu’elle m’aimait, qu’elle était désolée que je souffre mais qu’elle aimait aussi les personnes qu’il y avait dans sa vie. Je me suis retrouvé à lui dire que je ne voulais pas qu’elle fasse un choix, qu’il n’y avait pas d’ultimatum, mais qu’on pouvait peut-être commencer une thérapie de couple pour se voir et se parler plus. Elle a accepté. »

« Je ne voulais pas que Marc se sente rejeté »

Marc se dit qu’il faut comprendre pourquoi Sophie agit ainsi, et Sophie, de son côté, veut surtout ne pas perdre cet équilibre qui lui donne une certaine sécurité. Lors de leur première séance, le thérapeute leur explique que ces écarts de besoins ne sont pas forcément négatifs, mais qu’il faut aussi apprendre à respecter ce besoin de liberté, tout en maintenant un lien fort.

Sophie se reconnaît dans ces mots : « Je crois que j’ai toujours eu besoin d’un peu d’indépendance. J’ai grandi dans une famille où chacun avait ses espaces. Mais je ne voulais pas que Marc se sente rejeté ou abandonné. C’est vrai que j’ai beaucoup changé, que je me suis beaucoup investie dans ma famille, mais ce n’était pas pour m’éloigner de lui, c’est juste que j’ai aussi besoin de voir que je peux être moi-même. J’ai été touchée que Marc me dise qu’il doute et qu’il se sentait exclu. Ce n’est pas quelqu’un qui exprimait beaucoup ses sentiments avant ça, et j’ai réalisé que c’était très sérieux, qu’on était au cœur d’un problème qui pouvait nous coûter notre couple. »

En thérapie, ils apprennent à mieux communiquer, à exprimer leurs émotions, à respecter leurs différences. Lors d’une séance, Sophie ose dire : « Je veux qu’on continue à vivre ensemble, mais je ne veux plus qu’on se sente prisonniers de nos habitudes. Je veux qu’on retrouve notre spontanéité, nos rires, nos petits moments à deux. » Marc s’engage à casser la routine et à respecter sa liberté.

« On est heureux de rentrer à la maison et de retrouver notre cocon »

Le thérapeute et Sophie lui conseillent même de s’épanouir dans son propre espace, avec les gens qu’il a envie de voir. Sophie s’étonne qu’il écoute ce conseil : « J’ai connu un Marc un peu charentaises, heureux de rester à la maison à regarder la télé et puis, après ces discussions, je l’ai vu vraiment essayer de changer. Il n’était pas question de lui dire que j’avais raison de faire comme je faisais, et que lui avait tort d’aimer son confort. Mais plutôt de l’inciter à trouver son épanouissement et son bonheur aussi en dehors de notre relation. Il a renoué avec des amis qu’il ne voyait plus beaucoup. Il a recommencé à aller voir ses parents. Il s’est même mis à passer plus de temps avec les enfants. Comme ça quand on se retrouve, on a des tonnes de choses à se dire. On est heureux de rentrer à la maison, et de retrouver notre cocon et notre amour en se sentant libres de vivre nos vies.

Je crois que la thérapie lui a permis de retrouver confiance en lui et en nous. Et que moi, ça m’a appris l’empathie. Je faisais tout un peu comme une tornade et j’imposais mon rythme à ma famille sans me soucier de si ça leur convenait. Là, ça m’arrive de refuser une sortie ou de rentrer directement après le travail si je sens que ça fait longtemps que je ne l’ai pas fait. Je n’ai pas toujours besoin que ça fasse du bruit, qu’il y ai des tonnes de gens ou qu’on fasse des activités passionnantes pour être heureuse. J’ai aussi besoin de Marc, de nos enfants, de la sécurité de notre maison. »

Accepter l’autre avec ses besoins

Depuis la thérapie de couple, leur relation s’est renforcée. Sophie a commencé à prendre du temps pour faire des choses seule ou avec ses proches, sans que Marc se sente abandonné. Il a aussi compris qu’il devait lâcher prise, qu’il pouvait continuer à aimer et à faire confiance. Leur quotidien est devenu plus léger, plus riche, car ils ont décidé ensemble de faire de leur couple une alliance basée sur la compréhension et le respect mutuel. Aujourd’hui, ils savent que le vrai amour, c’est aussi accepter l’autre avec ses besoins, ses différences, ses silences ou son énergie débordante.