Uchronia imagine un appartement complètement fou marqué par une explosion de couleurs

Publié le 02 juin 2025 à 10h00

En faisant appel à Uchronia, le propriétaire de cet appartement parisien avait une idée en tête : créer un lieu unique, jamais vu, à mille lieues des intérieurs monochromes. Le résultat ? Une explosion chromatique de pièce en pièce, des matières vibrantes, des formes originales. Attention les yeux !

Par Jean-Christophe Camuset, Clémence Leboulanger

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Le luxe, c’est savoir s’affranchir des conventions, oser affirmer une identité singulière. Cette philosophie définit parfaitement le créateur autodidacte libanais Eli Mizrahi. Installé à New York, il a fondé la griffe Mônot en 2019, réputée pour ses robes semi-couture portées par Kendall Jenner, Demi Lovato, Zendaya… Lorsqu’il décide de poser ses valises à Paris après avoir longtemps privilégié les hôtels lors de ses séjours en France, c’est avec l’ambition claire d’y créer un espace aussi personnel qu’audacieux, prêt à recevoir ses clientes.

Dans cet ancien cabinet d’avocats à deux pas du parc Monceau, il commence par décloisonner pour faire entrer davantage de lumière. Au même moment, il flashe sur une table d’Uchronia repérée sur Instagram. Il suffira de quelques messages nocturnes avec le studio de création pluridisciplinaire pour que la collaboration prenne forme : au-delà du mobilier, Uchronia va se charger de la métamorphose radicale des lieux. « Eli voulait tout terminer en six mois, un défi que nous avons relevé frénétiquement durant l’été 2023 », raconte Julien Sebban, tête pensante de ce collectif connu pour ses prouesses hautes en couleur.

Le tissu, une matière magique pour habiller un appartement anticonformiste

Pour commencer, il repense les pièces tout en rénovant leurs codes haussmanniens : moulures, hauteur sous plafond et parquets classiques, l’objectif étant de les moderniser et d’introduire un grain de folie. « Je suis un original, je voulais que mon appartement reflète mon univers, qu’il surprenne par son anticonformisme », déroule Eli Mizrahi. Ce passionné de mode et de design s’implique totalement dans la sélection des pièces de mobilier mais surtout dans le choix des tissus. Il a un gros coup de coeur pour Prelle, manufacture lyonnaise dont Julien Sebban lui fait découvrir les velours et brocarts exceptionnels. En tout, près de 700 mètres d’étoffes sur mesure ont été commandés pour habiller rideaux, coussins et canapés. Les chaises « Chandigarh » de Pierre Jeanneret sont audacieusement agrémentées de coussins à pompons, les rideaux rehaussés de noeuds XXL en satin, les canapés vintage habillés de motifs floraux…

À chaque pièce, sa dominante chromatique

Côté couleurs, le studio Uchronia a travaillé des dégradés subtils. Les différentes nuances de rose et de bleu s’intensifient à mesure qu’on passe des espaces publics aux chambres, où des couleurs inattendues révèlent pleinement leur intensité dramatique. Quant à la collection d’art contemporain d’Eli Mizrahi, dans laquelle Uchronia pioche notamment l’installation de Julian Schnabel ou la sculpture murale de Vasily Klyukin pour le salon TV, elle donne le ton émotionnel de chaque pièce et achève de dessiner un appartement vibrant et hautement personnel, passionné et libre, comme son propriétaire.

À découvrir dans cette galerie :

Excentricité annoncée

Le salon typiquement haussmannien est magnifié par un geste décoratif décalé et raffiné, où le mobilier d’auteur dialogue avec les arts décoratifs contemporains. Canapé « Serpentine » de Vladimir Kagan (1950) revêtu d’un jacquard de soie (Prelle), piédestaux et vases en porcelaine d’Ebony Russell, horloge et chandeliers Napoléon III. À droite, fauteuils vintage « Miami » de Michael Wolk, habillés de tissu « Silkwork » (Prelle), lampe « Terrific Trepidations » (2022) en bronze et verre de Stanislaw Trzebinski et guéridon vintage en marbre. Au centre, table basse en aluminium d’Ado Chale. Pour parfaire cet écrin, rideaux (tissu Prelle) dessinés par Uchronia et suspension « Ambassador » de Mark Brazier-Jones.
Splendeur décuplée

Dans la salle à manger, les murs peints aux reflets métallisés (Atelier Roma) accentuent la magnificence du décor. Au centre, sous une suspension d’Uchronia mêlant verre de Murano et métal, trône la table « Arabesque » en verre fumé de Leonardo et Marzia Dainelli (Fiam Italia). Tout autour, les chaises « Chandigarh » de Pierre Jeanneret (Cassina) sont affublées de coussins fleuris à pompons (Prelle). À gauche, la console « Acropoli » d’Ettore Sottsass (1988) ajoute une touche radicale tandis que les sculptures lumineuses de Jochen Holz dialoguent avec les chaises hautes vintage encadrant la cheminée. Avec leurs noeuds XXL, les rideaux en tissu « Mademoiselle » (Dedar) affirment le caractère « couture » de cet intérieur.
Accents solaires

Parce que la vraie cuisine se cache au fond du couloir, une bulle lumineuse aux allures de salon de thé la complète, avec un meuble sur mesure en marbre bleu intégrant une vasque. Robinetterie (THG). Le studio Uchronia y a associé une teinte citron développée par Atelier Roma. Au mur, un tableau de Brice Guilbert évoque les éruptions du Piton de la Fournaise à la Réunion, tandis que l’applique « Ceramic Tulip » d’Elizabeth Garouste apporte sa touche poétique. Vase (Dinosaur Designs).
Tea-time

Dans ce même espace, les références classiques se teintent de fantaisie contemporaine. Le tapis « Swirl Spring » crocheté en laine d’Uchronia (cc-tapis) déroule sa palette pastel sur un parquet Versailles, tandis que les assises et la banquette vintage habillées de tissus Prelle invitent à une pause élégante autour des tables recouvertes de feuille d’argent signées Uchronia. Les appliques vintage aux abat-jour perlés (à droite) croisent la suspension « Flower » en résine (Univers Uchronia), tandis que les vases en porcelaine d’Ebony Russell trônent sur des sellettes ouvragées en plâtre. En arrière-plan, une armoire vintage dissimule la cave à vins du propriétaire.
Chambre noire

Avec ses murs laqués noir (Atelier Roma), le salon TV est plongé dans une obscurité dramatique. Suspendue au plafond, une installation lumineuse de Julian Schnabel imaginée pour le Gramercy Park Hotel à New York dialogue avec l’oeuvre murale contemporaine en polycarbonate, verre et acier de Vasily Klyukin, tandis que le canapé iconique « Safari », 1967, d’Archizoom (Poltronova) s’enroule autour d’une table basse en céramique raku d’Uchronia affichant un subtil dégradé.
Bibliothèque rose

Dans cette pièce aux boiseries classiques, le rose s’impose en fil conducteur. Sous la suspension tentaculaire de Christian Pellizzari (Galerie Nilufar), le mythique sofa « Cloverleaf » de Verner Panton (1969) déploie ses courbes généreuses. Pour l’accompagner, un tabouret en médium rose pailleté (Uchronia x Monoprix) et un autre de style plus ancien réinterprété (Uchronia x Passementerie Verrier x Prelle) près de la cheminée. Tapis « One-stroke 1/1 » de Nendo (Nodus Editions).
Orange couture

Il fallait à Eli Mizrahi, fou de mode, un dressing hors norme et fantaisiste. Défi relevé avec cet orange vibrant emblématique du style Uchronia. Le paravent, les rideaux et le daybed “Queen Anne” sont habillés de tissus Prelle, orchestrant un jeu de textures raffiné. Tout est signé Uchronia, du mobilier à l’applique « Seaweed » et au tapis dessiné pour Monoprix.
Fantaisie baroque

Dans les toilettes couleur lie-de-vin et au sol en marbre, chaque élément devient sculpture sous l’impulsion de l’artiste Nicholas Devlin, auteur de la suspension, de l’applique, du miroir, du lavabo et même du dérouleur de papier toilette. Oscillant entre surréalisme gothique et artisanat d’art, son univers transforme les lieux d’aisance en cabinet de curiosités. Au fond, une oeuvre de Robert Elibekian complète cette composition précieuse.
Bain d’émeraude

Dans cette salle de bains, le vert est omniprésent, du sol en mosaïque dessinant des vagues jusqu’au plafond en passant par les murs. Dans la niche, le miroir « Peanut » surplombe un lavabo en marbre Alpi Green (les deux, Uchronia). La baignoire à pieds de lion (Drummond) dialogue avec le secrétaire et la commode Louis XV de François Linke (XIXe), tandis que l’assise en tissu léopard de Jean Royère ajoute une touche insolente de glamour. À droite, les vases (Dinosaur Designs) ponctuent cet écrin néo-baroque aux accents surréalistes.
Brun cosmique

C’est le tableau de l’artiste américaine Danielle McKinney qui a déterminé la couleur dominante de la chambre laquée brun profond. Chaque élément participe d’une atmosphère à la fois intense et onirique. Le lit « Teddy » dessiné par Charles Zana se pare de draps aux motifs floraux (Prelle). Sur la table « Bisou », la lampe « Cosmos » (Uchronia pour Charles Paris) ajoute une touche spatiale, en écho au fauteuil « Sunny » en bois sculpté qui ponctue le décor d’une silhouette graphique et inattendue.