Au milieu des années 1980, cette Anglaise née en 1964 à Oxford se lance en même temps que Cindy, Naomi, Claudia et les autres. La légende veut qu’elle ait fait la couverture de plus de 300 magazines, dont les premiers numéros des éditions britanniques et américaines de ELLE. Quelques décennies plus tard, elle vit toujours avec Simon Le Bon (l’un des musiciens du groupe Duran Duran), avec lequel elle a eu trois filles. Incarnation d’un style effortless, celle qui pioche réguliè- rement dans le vestiaire masculin se livre avec une humilité rare et un humour british désarmant.

ELLE. Quel rapport entretenez-vous avec la beauté ?

Yasmin Le Bon. J’aimerais être mieux organisée. J’ai l’impression de devoir en faire plus en vieillissant, or je n’ai pas la patience. J’aime bien les cosmétiques, mais je ne suis pas très aventureuse, je laisse ça à mes filles. Je suis surtout attentive aux besoins de ma peau et à mon niveau d’énergie, qui sont liés. Ce qui m’importe le plus à présent, c’est de prendre soin de ma relation à moi-même et de nourrir mon univers intérieur, plutôt que de tenter d’améliorer mon apparence... sur laquelle, soyons honnêtes, rien de toute manière ne marche de façon spectaculaire !

ELLE. Comment prenez-vous soin de votre peau ?

Y.L.B. Avec le temps, je me suis rendu compte qu’il lui fallait plus d’hydratation. Il y a quelques années, on m’a offert un flacon de crème visage de la marque Augustinus Bader. En une utilisation, j’étais conquise. Je sais que c’est cher, mais j’estime que je le mérite maintenant ! Ma peau est devenue plus fine et réactive, donc je fais attention. Jamais de rétinol. En ce moment, j’applique également le sérum antioxydant C E Ferulic de SkinCeuticals, mais plutôt en cure que sur le long cours. Oh ! et j’oubliais un produit que j’adore : ma nièce m’a offert un déodorant naturel, sous forme de baume en tube, de la marque Akt. C’est une vraie découverte, je ne reviendrai jamais aux déos traditionnels.

ELLE. Et pour vos cheveux ?

Y.L.B. Ils sont colorés depuis mes 24 ans. Je fais confiance depuis longtemps à Charlie, du salon Four, à Londres. Je viens de les couper, et j’adore cette liberté nouvelle. Ceci dit, en vieillissant, on en perd beaucoup : du coup, je ne les brosse quasiment plus, sous peine d’en retrouver la moitié par terre dans la salle de bains ! J’aime beaucoup les produits Philip Kingsley et Olaplex. Quand j’avais les cheveux longs, j’adorais le spray démêlant 7 Seconds Detangler, d’Unite, que toute la famille utilise. En sept secondes, il n’y a plus un nœud.

ELLE. Est-ce que votre rapport au maquillage a changé ?

© Jan Welters

Y.L.B. Je devrais en porter un peu plus. Parfois, mes filles me disent que j’ai l’air de mauvaise humeur, alors que pas du tout ! Cela ne m’arrivait jamais avant. J’aime beaucoup les fonds de teint Chanel et Valmont, très agréables sur la peau. Pour les nuances, je suis fan de M.A.C, Nars, Chantecaille et Tom Ford. En ce moment, je craque pour les textures transparentes sur les paupières avec des nacres ou de fines paillettes. À mon âge, c’est joli d’apporter un peu de lumière, et c’est très facile à porter, sans être too much.

ELLE. Quel parfum portez-vous ?

Y.L.B. Le N° 19, de Chanel, depuis tellement longtemps que je ne le sens presque plus sur moi. On dit toujours qu’à ce moment-là il faut changer parce qu’on finit par en mettre trop, mais je ne m’y résous pas. D’ailleurs, j’espère que sa composition ne sera jamais modifiée.

ELLE. Vous êtes toujours très sportive ?

Y.L.B. J’ai en effet fait beaucoup de sport plus jeune, mais j’ai eu pas mal d’accidents. Aujourd’hui, je m’entraîne moins longtemps, mais très régulièrement. Il est très important de continuer de bouger et d’activer la circulation, mais je suis moins dure avec moi-même qu’avant. Je privilégie le renforcement musculaire car lorsqu’on vieillit les muscles fondent vite... Heureusement, cela revient vite aussi. Je m’entraîne avec un coach deux fois par semaine et, le reste du temps, je vais seule à la salle, où je fais trois séries d’exercices pour les bras, les jambes et les abdos, et quatre ou cinq minutes de cardio. Le tout dure vingt-cinq minutes, et ça suffit !

ELLE. Le matin, vous vous réveillez... et ?

Y.L.B. Mon chien me tire du lit pour aller faire sa promenade. C’est un moment que j’apprécie, qu’il pleuve ou qu’il vente. Ensuite, je prends un thé au jasmin.

ELLE. Suivez-vous un régime particulier ?

Y.L.B. Quand j’étais très jeune, je mangeais peu. Je faisais une sorte de jeûne intermittent sans le savoir. Cela ne me convient plus du tout. J’ai besoin de manger en petite quantité, mais plus souvent. Je fais attention à ce que je mets dans mon assiette bien sûr, mais je m’autorise un peu de tout. Je supprime parfois le gluten, ou les produits laitiers, mais j’y reviens aussi. J’ai repéré un magnifique gorgonzola au marché ce week-end. On ne pouvait pas passer à côté de ça ! La vie est trop courte.

ELLE. Faites-vous régulièrement des soins du visage ?

Y.L.B. Pas vraiment. En revanche, je viens d’acheter un masque Led (de la marque The Light Salon) car toute la famille passe par des phases de dépression saisonnière. Du coup, ce week-end, tout le monde a eu droit à ses dix minutes avec le masque. Je ne sais pas encore ce que ça va donner, mais je trouve le rituel très agréable, c’est un moment pour rêvasser.

ELLE. Et des soins du corps ?

Y.L.B. Je vois un physiothérapeute incroyable tous les quinze jours. J’ai longtemps considéré ça comme un luxe, mais je sais maintenant que c’est primordial pour la santé. Que ce soit un kiné, un ostéo ou un masseur, il faut trouver la bonne personne. Cela m’aide sur tous les plans, aussi bien physique que mental. Le toucher est primordial, c’est une façon de communiquer avec les cellules. D’ailleurs, c’est ce que je dis à mon mari quand je lui demande un massage des pieds : c’est capital pour mon bien-être.

ELLE. Des conseils pour bien dormir ?

Y.L.B. Le seul truc qui fonctionne pour moi, c’est d’avoir une grosse pile de livres sur ma table de chevet.

ELLE. Que transmettez-vous à vos filles, concernant la beauté ?

© Jan Welters

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Y.L.B. Honnêtement, elles s’y connaissent bien mieux que moi ! Elles sont plus informées et c’est génial d’ailleurs, on peut échanger des choses... (sauf ma crème Augustinus Bader, je suis toujours un peu stressée quand ma plus jeune fille rôde dans ma salle de bains !). En ce moment, par exemple, elles essaient de me convertir à l’idée du layering, le fait d’appliquer plusieurs soins à la suite. Mais je ne suis pas encore tout à fait convaincue.

LLE. Comme de nombreuses femmes, vous dites en interview avoir l’impression d’en faire « trop peu » en matière de beauté, alors que vous avez au contraire des routines sophistiquées, bien plus longues en tout cas que celles des hommes...

Y.L.B. C’est vrai que nous en faisons beaucoup ! Armée d’une pince à épiler et d’un miroir grossissant, je mène, par exemple, une bataille sans fin contre les poils sur mon visage. On est dans une tentative de maîtrise perpétuelle. Les hommes ont la vie tellement plus facile.

ELLE. Vous faites partie de cette génération de super models à la longévité unique sur les podiums. Comment l’expliquez-vous ?

Y.L.B. Avant nous, il y avait des tops qui travaillaient beau- coup, mais on ignorait leur nom. Grâce à la naissance de nouveaux médias, comme Fashion TV, on a commencé à nous connaître. On nous voyait beaucoup, mais on nous entendait peu, ce qui a entretenu le mystère. Et c’est ce qui nous a permis d’incarner tellement d’histoires de mode au fil des années. Et puis l’industrie était beaucoup plus petite, tout le monde se connaissait, on se considérait comme une famille. J’ai beaucoup de chance d’avoir débuté à ce moment-là, car le métier a beaucoup changé.

Il est devenu très difficile de se couper du travail et de protéger sa sphère personnelle

ELLE. Une de vos filles est mannequin. Pourriez-vous exercer ce métier aujourd’hui ?

Y.L.B. Franchement, je ne sais pas si je pourrais l’être aujourd’hui, car on leur demande énormément, notamment avec la promotion sur les réseaux sociaux. J’avais déjà du mal à refuser des jobs à l’époque, mais maintenant j’ai l’impression que c’est encore pire. Il est devenu très difficile de se couper du travail et de protéger sa sphère personnelle.

ELLE. Comment voyez-vous le fait de vieillir ?

Y.L.B. Je suis assez fataliste. Certains jours sont agréables, d’autres moins : on a parfois l’impression d’être coincée dans une enveloppe qui ne nous correspond pas. Je fais de très discrètes injections de Botox quelques fois par an. Une petite dose, pour ne rien figer, cela lisse quelques rides, et m’aide beaucoup ! C’est un chemin très personnel, et je ne m’interdis rien. Je dis toujours en rigolant que j’économise pour mon lifting. Je n’ai pas du tout envie de juger qui que ce soit sur le sujet. Il faut juste prendre en compte que c’est un peu risqué. C’est normal de se poser des questions et de vouloir essayer des choses. Je ne suis pas sûre de comprendre tout à fait ce que « vieillir avec grâce » signifie. Ou plutôt je ne suis pas certaine d’aimer l’idée. Bref, on verra. Peut-être que je laisserai juste faire la nature !

ELLE. Que faites-vous pour vous sentir bien ?

Y.L.B. Je ris beaucoup de moi-même et de tout, y compris de choses idiotes. Et puis c’est important de sourire plus au fil des années, même si ça peut paraître un peu forcé. Cela a un effet positif sur soi et sur les autres. L’autre secret, c’est de faire du bien autour de soi. J’essaie de faire au moins un compliment par jour à quelqu’un. Effet feel good immédiat.